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.Diriez-vous, Aude de Lavelanet, que ce verset, choisi au hasard parmi des milliers d’autres, répond à votre vision infernale de la foi, et de notre monde ? Diriez-vous qu’il représente, avec exactitude, cette tendance douloureuse qui pousse l’homme bon vers son propre Néant ? Ce que j’y lis, moi, est un message de Lumière.Je ne vois dans vos interprétations qu’un furieux désir de mort… Aude de Lavelanet, pourquoi désirez-vous la mort ?Il se tourna vers la parfaite.La foule suivait-elle encore la joute qui s’était engagée ? La comprenait-elle ? Ici et là, les fronts et les sourcils se plissaient.Étienne n’en avait cure.L’ardeur était un peu retombée.Il voulait amener Aude là où il la savait la plus vulnérable.Là-haut, sur les gradins, Escartille devina que l’inquisiteur avait un plan.Qu’il manigançait.N’y va pas, Aude.Ne va pas sur le terrain de cet homme.Aude, elle aussi, fronça les sourcils.— Cette phrase est inexacte.Il faut lire : Seul ce qui avait été fait en Jésus-Christ était la Vie, et la Vie était la lumière des hommes.— Ah… Seul ce qui avait été fait en Jésus-Christ… Autrement dit, le reste, ce monde qui est le nôtre, est l’œuvre du Démon… Vous nous accusez de ne pas traduire la Bible en langue vulgaire, mais la traduction que vous en faites est sujette à des interprétations sans le moindre fondement, Aude de Lavelanet.Vous y lisez ce que vous voulez y voir, et de vos erreurs de pensée procèdent vos erreurs de comportement… Pourquoi désirez-vous la mort ?Il referma la bible, dans un claquement sec.Il la regarda encore :— Je vais me faire l’avocat du Diable, Aude de Lavelanet.Ce Diable que votre hérésie, sans même le savoir, en vient à adorer comme le vrai Dieu… Je vais, quelques instants, abandonner à mon tour la vraie foi, oublier la Vie et la Lumière… Je vais, Dieu me pardonne, renoncer à mon sacerdoce, l’espace de quelques minutes, pour adopter votre point de vue… Ainsi, selon vous, il existe une racine éternelle du Mal, une lutte entre Deux Principes, dont on ne sait d’ailleurs, dans votre bouche, lequel est issu de l’autre – car il faut bien qu’il y ait un Créateur premier, une raison primordiale, n’est-ce pas ? Je vais donc être hérétique devant vous, le temps d’un songe…Il réunit ses deux mains sous son menton.— Vous me donnez le choix entre adhérer à l’ordre du Mal, ou renoncer à la vie terrestre, charnelle et temporelle, c’est bien cela ? Quelque chose m’échappe, dans cette savante construction, Aude de Lavelanet.Si le monde est mauvais, je suppose qu’il nous faut le changer, jusqu’à renverser les ordres existants, peut-être.Mais comment le changer si, ici-bas, Satan est et sera toujours tout-puissant ? Comment le changer, si cette religion nous interdit radicalement toute forme de violence ? Quelle alternative, enfin, proposez-vous ? Nous voici livrés aux chimères, aux seules forces aveugles, à une succession de hasards, là où notre liberté n’a plus de place… Il n’est d’autre solution que de fuir ce monde, de se retrancher derrière une ascèse des plus strictes… Oui, vous fuyez, Aude de Lavelanet… L’esprit et la charité ne peuvent admettre de laisser la place au corps…Il fit une pause, avant de reprendre :— Le corps, Aude, cette chair à laquelle vous niez l’espérance de toute résurrection, niant du même coup celle du Christ, le sens de son martyre et celui de l’Eucharistie… Ce corps qui est vôtre, qu’en rien il ne faut sauver, ce corps promis au nihil… Et les hommes, libérés de leur gangue, de leurs enveloppes, comme des papillons de leur chrysalide, passeraient d’existence en existence, leur âme seule se réincarnant en ce monde, jusqu’au Jugement final ?… Mais que faites-vous du corps du Christ lui-même, Aude ? Il ne saurait être rien pour vous !— C’est la charité du Christ qui est la source de ma foi.Danger, pensa Escartille.Il le sentait, ce danger, il le sentait monter, grandir ; mais il ne comprenait pas où l’autre voulait en venir.Étienne sourit.Il inspira lentement, puis assena :— N’est-il pas vrai, Aude, que votre foi, cette foi ardente, que vous dites si belle et si grande, qui vous rend si prompte à dénoncer le monde comme étant l’œuvre du Mal, recommande aux personnes ordonnées comme vous de demeurer pures ? N’est-il pas vrai qu’elle exige de vous de respecter en tous points la chasteté qui fait votre règle, chasteté qui procède de cette corruption naturelle de la chair, damnée par avance ?Aude cligna des yeux à plusieurs reprises.Pour la première fois, elle sembla hésiter.— Cela est vrai.Étienne de Saint-Thibéry passa fugitivement une main sur sa joue.— Bien… N’est-il pas vrai qu’en dehors de votre socià, cette suivante, adjointe, confidente avec laquelle vous ne cessiez de vous déplacer de forêt en forêt, se trouvait également un homme, et plus exactement…Étienne de Saint-Thibéry fit un geste en direction des soldats postés près des portes qu’Aude avait franchies, avant de venir à la barre.On introduisit alors dans la salle un homme d’une trentaine d’années, que l’on avait manifestement torturé, lui aussi.Il portait une chemise blanche, ouverte sur son torse dégoulinant de sueur, des braies maculées de terre, des chausses trouées.En voyant le regard interloqué de la parfaite, il baissa les yeux, hochant la tête et retenant ses larmes.— … Et plus exactement cet homme-là, Jean de Montréal, agent de liaison lui aussi pour le compte de votre secte, entre les communautés de Mirepoix, de Lavelanet et de Carcassonne ?Héloïse, sur les gradins, plissa les yeux.Cet homme n’était autre que le mystérieux personnage venu parler à son père, dans la foganha de la maison, avant qu’elle ne s’enfuie à son tour ; ce ductor qu’elle avait suivi de Lavelanet à Pamiers, et qui, contrairement à Forças, avait jusque-là échappé à la mort.Débarrassé de son manteau noir et de son bâton, il avait perdu toute noblesse.La parfaite cligna encore des yeux, sa bouche s’agrandit de stupeur.Elle avait compris.Ses mains tremblèrent sur le barreau de bois.— Vous ne répondez pas… Cet homme-là n’était-il pas dans la forêt de Pamiers avec vous ?— Il… Il y était, dit Aude dans un souffle.— Bien, dit Étienne de Saint-Thibéry [ Pobierz całość w formacie PDF ]

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